BELPHEGOR

2018 Arles

Belphegor
Vivre au musée


De cet enfant qu'il fut – tremblant de voir ou ne pas voir, caché sous une table, l'ombre du fantôme du Louvre – à l'artiste, hantant les musées à la recherche de la magie fugitive des matières et des corps, il y a, pour Gilles Magnin, une absolue continuité.

La quête du photographe est dès lors de discerner les ombres, regarder ce qu'il y a, ici et là, et aussi l'autre côté, l'avers et le revers. En somme, lâcher la proie pour l'ombre.

Gilles Magnin réinvente avec Belphegor, son exposition Paris-Berlin « intime-extime », proposée une première fois en 2011, lors d'une carte blanche au musée Gatien Bonnet de Lagny sur Marne, il s'agissait alors de déjà questionner l'espace muséal avec cette notion d' « intime-extime" exprimée par l'écrivain et grand amateur de photographie Michel Tournier.

Les musées exercent sur l'artiste une fascination toujours vivante : ce sont pour lui les lieux fragiles du brouillage des limites de l'espace et du temps : Qui y est objet ? Qui y est sujet ? Est-il, sommes-nous dedans ou dehors ?

La délicatesse de son regard réside dans son ouverture : le sujet n'est pas forclos, emprisonné par l’œil du photographe mais s'échappe, offert à l'interprétation de cet autre sujet (ou objet !) qu'est le spectateur, dans une troublante mise en abyme.
Le sens circule alors, entre l'antique et le contemporain, (re)donnant vie à l'objet sans jamais en figer le sujet.

Belphegor, opaque objet du désir, hommage, non sans humour, aux ombres du passé, qui traversent fugacement mais obstinément, nos vies et nos mémoires.